Miroir

13 août 2005

Lecture intime

J'étais tombé sur son blog par le plus grand des hasards. S'abandonner sur le Net ne mène généralement nul part mais, parfois, les chemins aboutissent en des lieux délicieux. C'était le cas cette fois là.
Je commençais à lire les première pages, y prenant un plaisir inédit. Le style se mariait parfaitement avec la sensualité du récit. Les aventures proposées aux yeux de tous montraient la délicatesse de celle qui s'exposait ainsi anonymement. Chaque nouveau paragraphe était plus excitant que le premier. Je lisais la première histoire, puis la suivante, et encore celle qui suivait, m'y plongeant avec délice. Je me demandais ce que j'appréciais le plus : la sexualité intense et maîtrisée de l'auteur ou le sentiment délicatement pervers procuré par cette sorte de voyeurisme épistolaire. Les deux se mêlaient, se complétaient, se renforçaient, donnant à la lecture de ces récits un pouvoir érotique difficile à soupçonner au premier abord.

J'étais presque hypnotisé par ces textes, plongé dans les images qu'ils créaient dans mon imagination, indifférent au réel qui m'entourait. J'aurais été incapable de m'apercevoir de sa présence. Elle était arrivée peut-être quelques secondes avant, peut-être quelques minutes, ou bien depuis plus longtemps, je ne pouvais pas le dire. Elle n'avait fait aucun bruit sans doute. Volontairement ? Par jeu ? Ou bien n'ai je rien entendu. Je l'ignorais. J'étais tout à ma lecture dont aucune ligne ne me laissait indifférent. Je savais que le désir érotique avait pris possession de toutes les parties de mon corps, mais j'ignorais à quel point.

Je ne me suis aperçu de sa présence qu'à l'instant où elle posa ses mains sur mes épaules. Ce contact si agréable pourtant me fit sortir brutalement de mon extase. Bien évidemment, je commençais à rougir plus que je croyais jamais pouvoir le faire avec elle. J'avais l'impression d'être surpris comme un adolescent. Pourtant lire des textes érotiques ou regarder des photos libertines étaient un passe-temps que nous avions déjà pratiqué ensemble. Et ce n'était pas non plus une activité à laquelle je m'adonnais fréquemment, ni surtout en cachette. Et pourtant, je me sentais cette fois là coupable. Comme je l'aurais été d'être surpris dans les bras d'une autre. Je ne savais pas si elle avait ressenti ou deviné mon émoi.

"Qu'est-ce que tu fais ?" me demanda-t-elle d'une voix très douce.
Je ne savais pas trop quoi répondre. Que je prenais une sorte de plaisir sans elle ? Que j'étais attiré par la femme que j'imaginais derrière les mots qui s'affichaient sur l'écran ? Que les situations et les relations si bien racontées m'avaient excité ? Je n'arrivais qu'a bredouiller.
"Oh, heu, je parcoure un blog."
"Ah ? C'est sur quoi ?"
Elle se pencha un peu au dessus de moi pour mieux voir pendant que je revenais au sommaire, espérant naïvement dissimuler un délit imaginaire. J'espérais que les titres des articles ne seraient pas trop explicites. Je m'aperçu aussitôt à quel point je me trompais. Les mots qui me sautaient aux yeux étaient ceux qui m'avaient aussi attiré : "Le monde sensuel de Florence" trônait en tête de la page. Suivi de très près par le titre du post daté du 19 juillet, peu équivoque : "Extase". Et, comme pour me narguer, sur la fenêtre de mon navigateur, la dernière ligne du texte qui s'affichait, semblant attirer le regard, était sans ambiguïté: "Marie suce Bruno de sa seule bouche."

"Marie suce Bruno de sa seule bouche."
Elle répéta la phrase en détachant chaque mot. Je respectais le silence qu'elle avait fait suivre. Je me demandais ce qu'elle pensait de ces mots, de ce qu'elle devinait du site, de moi par la même occasion. Je ne pouvais voir son visage qui était au dessus de moi, je ne sentais que ses mains sur mes épaules qui n'avaient trahi aucune émotion. Je la sentais se pencher un tout petit peu plus au dessus de moi, pour mieux lire. Je sentais ses seins sur le haut de mon dos.
"De sa seule bouche."
Elle répétait ces mots, comme pour mieux se les approprier.
"Qu'est-ce que ça veut dire ?"
Sa question n'attendait pas de réponse, du moins, pas de ma part.
Elle semblait lire avec intérêt le reste du texte. Je sentais son souffle tout près. Elle avança le bras pour poser sa main sur la mienne. Elle fit glisser la souris pour faire se dévoiler le reste du texte qu'elle lu tout aussi attentivement.
"C'est bien écris, je trouve..."
"Chut !", m'ordonna-t-elle. Je respectais son ordre. Scrupuleusement.
A chaque fois qu'elle finissait un paragraphe, sa main sur la mienne bougeait la souris pour descendre un peu plus bas. L'idée que ce geste était le même que celui d'une main découvrant le corps de son partenaire me traversa l'esprit.

"C'est bien", conclut-elle quand elle eut fini. "Tu as lu les autres ?"
"Oui, enfin, pas tous, mais certains."
Je pensais qu'elle me demandait mon avis sur mes précédentes lectures. Elle retira une de ses mains de mon épaule et me fit légèrement pivoter avec le fauteuil. Elle se glissa entre moi et le bureau où se trouvait l'écran.
"Lis moi les autres" souffla-t-elle doucement. Elle ne souhaitait aucune objection visiblement. Je n'en n'avais d'ailleurs pas. J'étais juste un peu surpris de sa réaction et dérouté par sa demande.
"- A haute voix ?
- Bien sûr."
Je me sentais un peu gêné, trouvant cet exercice d'acteur difficile.
"- Lequel veux-tu ?
- Commence par celui que tu veux", répondit-elle tout en s'accroupissant devant moi tout en prenant appui sur mes genoux qu'elle écartait.
Je parcourais la liste des titres qui s'affichait devant moi, n'osant porter mon regard sur elle qui s'affairait déjà. "Mon premier trio" ou "Deux hommes" avaient ma préférence. Mais je les avais déjà lus, et j'avais envie de découvrir d'autres émotions. Je fis mon choix.
"Mon côté exhibitioniste, ca te va ?".
Elle sourit.
"Le tien ou le sien ?".
Elle avait libéré mon sexe qui ne permettait pas de douter de l'effet que me faisait cette séance de lecture improvisée, et le tenait en main, bien en vue, comme si elle l'offrait aux regards. Elle n'attendit pas la réponse pour plonger son visage dessus et prendre le gland entre ses lèvres. Je n'avais plus rien à dire si ce n'est commencer ma lecture. Les premiers mots me firent buter un peu. Je n'ai pas l'habitude de lire à haute voix, et encore moins pendant qu'elle me gratifie d'une fellation.
Elle m'interrompit à la troisième phrase.
"Tu lis trop vite."
Je m'en rendais compte, et ralentis mon débit. J'essayais de me caler sur le rythme de ses caresses buccales, laissant les mots franchir mes lèvres en phase avec les allées et venues des siennes. Je m'arrêtais quelques instants à la fin du premier paragraphe, voulant recueillir son avis. Elle ne fit aucun commentaire, elle se releva seulement un peu pour admirer l'objet de son délit qu'elle faisait coulisser dans sa main, le mouillant abondamment de sa salive et lâcha seulement "Continue" avant de le reprendre en bouche.

Je continuais. Lentement, sensuellement, souhaitant lui procurer un plaisir en comparaison avec celui qu'elle me prodiguait. Je me demandais si elle prenait réellement du plaisir à la situation ou si elle souhaitait simplement me dissuader d'aller trop souvent sur ce genre de site. Mais dans ce cas, pourquoi me demanderait-elle de lui lire ces textes ?
J'essayais de deviner à ses caresses sur ma bitte les passages qui lui plaisaient le plus. Je me disais que la situation pourrait peut-être me permettre de découvrir certaines de ses envies intimes qu'elle était si réticente à dévoiler. Je remarquai que sa langue se faisait plus appliquée sur certains mots, et qu'elle acquiesçait d'un gémissement presque inaudible sur d'autres. Ils influençaient ses gestes et le balancement de son torse.
"Quatuor".
Elle se redressait un peu, tournant sa tête pour prendre mon sexe sur le côté.
"Concupiscence".
Elle descendait sa main très bas sur ma verge, l'autre venant soupeser mes couilles gonflées.
"Très largement".
Elle prit profondément ma queue, ses épaules venant écarter un peu mes cuisses autour d'elle.
Elle s'octroya une pause l'espace d'un instant pour reprendre son souffle sur "amour pluriel", et se mit à lécher du bout de la langue quand je prononçai "fourrage".

Je n'en pouvais plus, la situation était intenable. En quelques instants j'étais passé du rôle un peu pathétique du voyeur sur Internet, à celui de fautif, puis enfin à celui de lecteur et d'amant. Je devinais qu'elle me sentait aussi au bord de l'explosion. Elle me connaît bien. Elle soulignait les mouvements de tout son buste sur ma queue par ceux de ses mains sur ma verge. Son torse tanguait en rythme comme si elle s'empalait sur un autre sexe. J'arrivais au derniers mots de ma lecture...
"Et moi je jouis comme jamais..."
Je faisais un effort pour ne pas être l'acteur de ma lecture et peinait à terminer le dernier mot qui se finit dans un murmure. Le silence retomba, à peine entamé par le frôlement de nos peaux et nos habits, et par son souffle. Elle continua son ouvrage quelques minutes sans se préoccuper du fait que j'avais fini de lire. J'attendais qu'elle me demande de continuer.

Elle s'arrêta brusquement, en souriant vers moi, remettant ses mèches de cheveux de chaque côté de son visage. Mon sexe trempé brillait de sa besogne et de mon désir. J'étais à sa merci, totalement, elle seule allait décider de mes prochaines minutes. Elle pouvait me laisser ainsi, entre les deux rives, ou bien m'amener là ou elle voulait.
"C'est fini ?"
J'acquiesçais d'un geste de la tête. Elle sourit à nouveau.
"C'était très bien."
Elle croisa ses bras et ôta son débardeur sous lequel elle ne portait rien. J'adore voir sa poitrine quand elle lève les bras, ses seins remontés très hauts. Elle ne me laissa pas l'admirer longtemps. Elle se pencha à nouveau sur mon sexe et le reprit en bouche, beaucoup plus intensément et goulûment cette fois-ci. Elle savait où elle voulait en venir et comment y arriver. Elle s'activa avec un mélange de douceur et de fermeté auquel je suis incapable de résister... même si je le voulais. Très vite, elle sentit que j'étais tout à elle. Elle me sortit une dernière fois de ses lèvres et ses mains prirent le relais sur le membre luisant de salive. Elle ressentit peut-être la première les prémices de mon extase. Sous sa main, la vie jaillit, puissamment, pendant que je m'abandonnais totalement à elle.

Elle me guidait vers sa poitrine, recueillant le liquide épais sur ses seins, dirigeant le jet de droite à gauche comme pour s'en recouvrir le plus largement possible. Elle était concentrée sur cette tâche, ne prêtant pas attention à mon orgasme qui me faisait gémir pendant de longues secondes.
La fureur passée, mon corps se relaxait après avoir été tendu à l'extrême. Je lui avais confié toute ma liqueur. Je la regardais. Elle me souriait, tenant délicatement mon sexe maintenant penaud.
Elle baissa les yeux sur sa poitrine souillée, souriant toujours largement. Elle approcha sa main et tendit son index, comme pour en recueillir quelques gouttes. Elle fit glisser son doigt sur le haut de sa poitrine, de haut en bas, et de droite à gauche, le promenant à plusieurs endroits.
Elle reposa sa main et se cambra un peu en me souriant toujours.
Sur le sperme étalé, je pouvais lire les lettres qu'elle avait tracé: FIN.

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